OLYMPE AUTOUR DU MONDE

 

ARCHIPEL DU VANUATU

Un peu de géographie

Situé à quelques 1800 km à l'est de l'Australie et à 550 km au nord-est de la Nouvelle Calédonie, l'archipel comprend 81 îles et îlots s'étendant le long d'un axe sud sud-est nord nord-ouest sur 1000 km environ.

Ces îles sont d'origine volcanique, certains volcans étant encore actifs comme le Yasur sur l'île de Tanna au sud ou les volcans de l'île d'Ambrym.

Situé à proximité de la ceinture de feu du Pacifique, l'archipel est soumis périodiquement à des tremblements de terre parfois suivis de tsunami dont les deux derniers, en 1999 et en 2002, ont ravagé les îles de Pentecôte et la capitale Port Vila sur Efate.

Le climat varie du sud au nord entre des caractéristiques subtropicales et tropicales.

L'archipel, peuplé d'environ 250 000 habitants, ne comporte que deux villes : Port Vila, la capitale située sur Efate, et Luganville située sur Espiritu Santo, la plus grande des îles. La population est donc essentiellement rurale et vit d'une économie basée sur l'agriculture et la pêche de subsistance; seule la culture du copra est intensive grâce à d'importantes plantations de cocotiers.

Le Vanuatu possède en outre la plus forte densité linguistique du monde avec 110 langues vernaculaires (dont deux sont aujourd'hui éteintes) en plus des langues officielles et d'importation récente due à l'immigration.

Un peu d'histoire

Les plus anciens vestiges prouvant la présence de l'homme ont été datés à 2000 ans avant J.-C. Le premier européen à avoir atteint ces îles est le portugais de Quiros en 1606 qui aborda à Espiritu Santo; ce fut ensuite Bougainville en 1768, plus d'un siècle et demi plus tard, qui appela ces îles Grandes Cyclades puis Cook en 1774 qui les nomma Nouvelles Hébrides, nom qui perdurera deux siècles.

Les premiers missionnaires arriveront dans les années 1830-1840 et payèrent un lourd tribut à leur tâche, les autochtones étant pour la plupart anthropophages…

Puis ce fut le commerce du bois de Santal mais aussi la déportation de population vers le Queensland par les australiens.

Curieusement, ni la France ni la Grande Bretagne ne paraissaient motivées pour annexer ces territoires et ce n'est qu'en 1887 qu'un statut provisoire est mis en place aboutissant à une originalité sans précédent et jamais renouvelée depuis : la création en 1906 d'un condominium franco-anglais! Ainsi, toutes les structures étaient dédoublées, administrations, écoles, langues etc. C'est ainsi que subsiste aujourd'hui une double culture française et anglo-saxonne.

Malgré leur réticence, La Grande Bretagne et la France accordèrent l'indépendance à l'archipel qui prit alors le nom de République du Vanuatu en 1980. Mais aujourd'hui, proximité aidant, c'est l'Australie qui tire les marrons du feu en investissant massivement dans le pays.

Notre séjour

Tanna ou pas Tanna

Notre idée première était de nous arrêter sur l'île de Tanna pour y visiter le volcan encore actif; et puis notre "ami" Joseph (voir notre escale sur l'île de Lifou) espérait bien nous y voir! Qui plus est, l'île se situe dans le sud de l'archipel et donc sur la route des autres îles intéressantes situées plus au nord.

Mais l'avant-veille de notre départ de Nouméa, nous croisons à Port Moselle l'équipage de Badinguet, le Super Maramu que nous avions croisé dans la baie de Cook à Moorea. Il revenait du Vanuatu enchanté de ses escales mais nous apprit que le volcan était en éruption et qu'il n'avait pas pu s'y arrêter. Au même moment nous recevions de la part de Monique, restée en France, un mail nous confirmant que le niveau d'alerte du volcan Yasur était à son maximum.

Que faire? Nous avions envie de tenter tout de même un arrêt. Nous partîmes donc de Nouméa le 15 juin en direction de la passe de la Havannah; le vent était plein est, donc dans le nez et nous gagnâmes la passe de sortie du lagon au moteur puis hissâmes les voiles dès la passe franchie en direction de Tanna au près serré.

La première nuit et la journée du lendemain se passeront sans soucis mais, au cours de la seconde nuit de navigation, le vent se mit à tourner progressivement au nord-est nous détournant d'autant de notre cap pour atteindre Tanna. Dans la journée du 17, un des deux boulons de fixation du chariot de grand-voile se casse et nous devons gréer l'écoute de grand-voile sur le point d'amure du foc d'artimon. Voilà qui n'arrange pas notre cap avec un vent qui ne cesse de prendre du nord-est.

Compte tenu de notre cap et de l'incertitude de pouvoir effectivement visiter le volcan, nous décidons alors un peu à contre cœur de supprimer l'escale de Tanna et de poursuivre vers Efate dont la direction est plus en rapport avec le cap que nous pouvons suivre.

Port Vila, île d'Efate

Dans la nuit du 17 au 18 juin, Gérard nous dit reconnaître les odeurs qu'il a emmagasinées dans sa mémoire olfactive; sans doute les odeurs de copra qui émanent des fours de séchage que nous verrons partout sur les îles. Et c'est à 2h30 du matin que nous mouillons dans la rade de Port Vila, capitale de la République du Vanuatu, dans la zone de quarantaine; nous sommes samedi et notre guide nous dit qu'il est bien difficile de mobiliser les autorités en dehors des heures normales et le week-end. Nous avons alors peur de rester bloqués sur le bateau jusqu'au lundi, qui plus est dans une zone mal protégée sujette à un roulis très inconfortable.

Mais dans la matinée, ayant hissé le pavillon "Q", nous reçûmes la visite d'un représentant du service sanitaire, très cool, qui nous donna notre quitus, nous autorisa à amener le pavillon en nous disant d'aller le lundi voir les services de douanes et d'immigration en ville. Il nous guida ensuite dans le chenal étroit et peu profond qui conduit derrière l'îlot Iririki où se situe une zone de mouillage sur bouée très abritée. Nous étions au paradis!

Vu du mouillage, l'environnement est des plus sympathiques et c'est pour nous une bonne surprise; on se croirait presque dans un lieu chic pour milliardaires! Sur l'îlot Iririki, un établissement hôtelier haut de gamme s'est approprié le rivage et sa jolie petite plage de sable blanc; de l'autre côté du chenal, la ville de Port Vila semble animée; elle est dominée sur les hauteurs par quelques villas immenses de grand standing.

Nous mettrons l'annexe à l'eau pour débarquer sur le ponton d'un restaurant et faire une première visite de la ville que Gérard redécouvrait 24 ans plus tard; Monique y avait en effet été institutrice alors qu'il œuvrait sur d'autres îles de l'archipel.

La réalité vue de l'intérieur était quelque peu différente de l'image que nous en avions eue du bateau; on est davantage dans un pays du tiers monde que sur la Croisette! Mais une activité intense semble y régner, le trafic de voiture est assez dense et surtout nous sommes surpris par la densité de magasins d'habillement, de souvenirs et d'artisanat bien évidemment destinés aux touristes. Rien à voir avec Nouméa où il n'y avait pratiquement…rien! La ville est concentrée autour de sa rue principale en front de mer mais s'étend aussi quelque peu sur les hauteurs avoisinantes.

Nous repérons les principaux sites qui nous serons utiles : douanes, immigration, marché et super marché ("Au bon Marché"!), et tomberons par hasard sur une aire aménagée pour la pétanque où des ni vanuatu font preuve d'une adresse étonnante. L'atmosphère de la ville, le sourire de ses habitants et le soleil éclatant qui nous accompagne sont de bon augure pour les quelques jours que nous allons y passer.

Nous entrons également dans une galerie d'art d'inspiration française où nous rencontrons Juliette qui en est la gérante; Gérard lui demande des nouvelles d'Emmanuel Watt, un sculpteur qu'il a connu à ses débuts. Il passe souvent à la galerie et Juliette l'informera de notre passage pour essayer d'organiser un rendez-vous.

Le lendemain dimanche est d'abord consacré à des lessives et au démontage du chariot de grand-voile; une des deux grosses vis inox qui le fixent est sectionnée net, l'autre est légèrement tordue! Pourra-t-on en retrouver ici, d'après les "quincaillers" que nous avons vus la veille, ça ne semble pas gagné!

Puis nous repartons en ville pour explorer un peu les hauteurs; nous tombons sur le temple où la cérémonie dominicale se déroule accompagnée de très beaux chants. Dehors, de jeunes enfants jouent avec la cloche sous la surveillance de parents restés à l'extérieur. Tout cela est bon enfant, les sourires sont sur tous les visages et l'on entame facilement la conversation. Gérard retrouve intact l'esprit de cette population réservée, timide même et d'une grande gentillesse.

Longeant le joli stade et sa tribune d'honneur, nous rejoignons quelques centaines de mètres plus loin la cathédrale catholique du Sacré Cœur; l'office y est terminé mais nous tombons sur Jean-Charles, un ni vanuatu qui a des responsabilités d'encadrement d'associations de jeunes et qui nous explique son étonnant parcours : il fut en effet durant onze années le maître d'hôtel d'un pacha de la marine française. A ce titre, il connait bien la France en général, Brest en particulier et a roulé sa bosse autour du monde.

Gérard l'interroge sur des personnes qu'il a connues pendant les quatre années passées au Vanuatu et Jean-Charles les connait presque toutes! Emotion garantie pour Gérard convaincu qu'il pourra ainsi les retrouver, notamment Léa, une ancienne collègue, le Père Rodet, un missionnaire travaillant maintenant à l'évêché mais qui œuvrait à l'époque sur l'île de Malakula (mais nous y reviendrons), Emmanuel Watt le sculpteur dont nous avons déjà parlé.

L'après-midi sera consacrée à une ballade en annexe autour de l'îlot Iririki où Gérard et Monique venaient souvent se promener avec Florian. Côté sud, des constructions ont été érigées par l'hôtel qui font davantage penser à de petits HLM qu'à une résidence de vacances! Puis nous aborderons le petit ponton d'accès à l'hôtel près duquel nous sommes mouillés pour nous entendre dire qu'il faut payer pour se promener sur l'îlot! Vanuatu, n'es-tu pas en train de perdre ton âme?

Nous discuterons un moment avec un des gardiens faisant office de comité d'accueil des touristes résidant à l'hôtel qui connaît lui aussi pratiquement toutes les anciennes relations de Gérard! Quant au ni vanuatu en costume traditionnel, il prendra la pose pour nous avec sa conque en guise de sirène…

Le lundi matin sera consacré aux formalités d'entrée sur le territoire : douanes et service de l'immigration. Pour l'immigration, pas de problème, on nous indique l'immeuble situé près du centre de la ville en bord de lagon; par contre, nous nous présentons au service des douanes que nous avions repéré au sein de l'immeuble gouvernemental pour nous entendre dire que maintenant le service des douanes compétent se trouve au quai du port de commerce de l'autre côté de la ville. Le mieux est donc de reprendre l'annexe pour nous y rendre; nous accosterons sous la proue d'un immense bateau de croisière australien, le même sans doute que celui que nous avions aperçu à l'île de Lifou.

Puis revenant en ville, nous passerons à l'Alliance française que Gérard avait contactée par mail avant de quitter la France. Mais le lundi matin elle est fermée! Nous verrons alors arriver au mouillage, loin dans la baie à cause de son tirant d'eau, le fameux yacht à voile de 30m aperçu à Lifou.

L'après-midi, alors que le captain part à la recherche de vis inox pour le chariot de grand-voile et que son second se promène en ville et fait un peu de shopping, Gérard repart à la recherche de ses racines; nous le retrouverons en fin d'après-midi à la terrasse du bar Naubawan ("Number One" en bichlamar, la langue locale…) accompagné de Léa, son ancienne collègue aujourd'hui à la retraite mais toujours très occupée par de multiples activités dont la formation de jeunes et moins jeunes à l'utilisation de l'informatique pour des applications multimédia. Partage de souvenirs communs, nostalgie et émotion furent au rendez-vous!

Et puis, passé à l'évêché, Gérard avait pu aussi rencontrer le père Rodet, une figure locale hors du commun qui nous attendait le soir à son nakamal situé sur les hauteurs de la ville côté lagon. Le nakamal est une immense case traditionnelle faite d'une charpente de bois et recouverte de feuilles de cocotiers tressées, qui sert de lieu de rencontre et de rassemblement et où se gèrent et se règlent généralement les litiges communautaires.

A la nuit tombée, nous voilà donc partis, lampe torche en main, sur les hauteurs de la ville, évitant les pièges de toute sorte réservés aux piétons, tant les accotements et les trottoirs sont défoncés! Il nous faudra l'aide d'un autochtone pour trouver le nakamal au fond d'un chemin où nous attendaient non seulement le père Rodet mais également un autre père missionnaire âgé, présent au Vanuatu depuis 60 ans, et André, un ancien entrepreneur d'avant l'indépendance dont nous n'avons pas bien compris les liens avec les pères.

Comme le veut la tradition, un feu de bois est allumé au centre de la case et nous sommes accueillis avec une bolée de kawa, la boisson traditionnelle du Vanuatu et de la Nouvelle Calédonie, l'origine en étant cependant vanuataise. Nous y avions échappé en Nouvelle Calédonie mais ici, pas question de refuser! Ce breuvage est élaboré en pressant les racines d'un poivrier sauvage aux multiples vertus (près d'une centaine de substances utilisées en pharmacopée y a été décelée) et en coupant plus ou moins avec de l'eau; le vrai de vrai se fait en mâchant les racines et en recrachant le jus qui en sort…

L'aspect n'est déjà pas très engageant, ressemblant à une eau boueuse, l'odeur aurait fini de vous dissuader si vous ne vouliez pas vexer vos hôtes mais le goût est pire que les deux réunis! Ce que nous ne savions pas, c'est qu'il faut le boire cul sec sans respirer et non pas par petites gorgées gustatives qui ne font que prolonger le calvaire! Le seul avantage de cette boisson non alcoolisée est l'effet anesthésique et calmant que nous n'avons d'ailleurs pas ressenti pour cause de trop grande dilution.

Mais revenons à l'essentiel et disons quelques mots du père Rodet; il est de ces hommes qui ont consacré leur vie au service des autres, dans des conditions parfois extrêmement difficiles. Jeune prêtre de 32 ans, il décide de partir comme missionnaire en 1961 dans cet archipel, apporter sa pierre à l'édifice commencé par les premiers missionnaires à la fin du 19ème siècle. Il pensait naïvement pouvoir accomplir son sacerdoce comme il l'aurait fait dans n'importe quelle paroisse de France; c'était méconnaître la réalité du terrain et, tout en effectuant son travail sacerdotal, il dut se transformer rapidement en entrepreneur constructeur pour édifier des routes d'accès, une église, une école, faire de l'adduction d'eau pour le village, trouver des financements, faire travailler la population sur ces chantiers tout en continuant de la convertir alors qu'elle sortait tout juste de ses coutumes moyenâgeuses et du cannibalisme! Et pour cela, il fallait se battre : contre les autres congrégations, contre les pouvoirs tribaux et officiels, contre les représentants de l'état français et parfois même contre sa propre hiérarchie! Mais l'homme ne manque pas de caractère.

Parallèlement à ce travail de titan, il regroupa au fil du temps des objets de la culture traditionnelle, objets et outils du quotidien mais aussi œuvres artisanales venant de toutes les îles de l'archipel afin d'en sauvegarder l'héritage culturel; il les a aujourd'hui rassemblés dans un musée personnel qu'il nous invitera à venir visiter le lendemain.

A 82 ans, toujours bon pied bon œil, il est toujours aussi dynamique, fourmille d'idées et a encore le projet de construire une maison de retraite pour tous ceux qui l'ont aidé dans son œuvre. Voilà un bel exemple de courage et d'abnégation à l'image de tous ses pairs dont on ne parle pas mais qui ont participé à améliorer la vie d'une population et à développer l'influence de la France et de la francophonie bien plus efficacement que tous les programmes étatiques foireux et sans suite!

C'est admiratifs que nous regagnerons le bord, admiratifs et humbles devant le bilan d'une telle vie comparé aux nôtres!

Le lendemain matin, on répare et remonte le chariot de grand-voile mais, un problème technique chassant l'autre sur un bateau, c'est le groupe électrogène qui refuse de démarrer! La batterie de démarrage est à plat pour une raison simple : voulant que le compartiment machine soit bien ventilé, le captain avait demandé que les deux ventilateurs de soufflage et d'extraction de la cale soient asservis au fonctionnement du groupe comme ils le sont à celui du moteur principal. Mais la consommation électrique de ces deux ventilateurs s'avère supérieure à l'apport de l'alternateur de charge du groupe et la batterie s'est petit à petit déchargée. Nous en serons quitte pour la démonter, l'emmener dans une station service pour la recharger et débrancher les fils d'asservissement pour que le problème ne se reproduise plus.

Puis nous reprenons le chemin du nakamal du père Rodet qui nous attend pour nous faire visiter son musée. Bien honnêtement, nous ne nous attendions pas à ce que nous allions voir! Dans un bâtiment neuf fait de béton et de bois, une collection de pièces d'une incroyable richesse et diversité; aux dires du père lui-même, une collection bien supérieure à celle du musée national du Vanuatu et pour nous sans commune mesure avec le très médiocre centre culturel Tjibaou de Nouméa! Comment est-il d'ailleurs possible qu'avec tout l'argent mis sur la table par la France on soit arrivé à un si médiocre résultat alors qu'avec si peu de moyens, une seule personne ait pu constituer une telle mine culturelle? Vous avez dit argent jeté en l'air? Non, je n'ai rien dit…

Divisé en trois parties distinctes : d'où venons-nous, où sommes-nous et où allons-nous, nous pûmes admirer cette collection avec les commentaires éclairés du père. Son souci est d'ailleurs de savoir ce que deviendra ce musée à sa disparition, car il semble très dubitatif sur les capacités des instances culturelles locales à prendre le relais…

Pour terminer la matinée, le Père Rodet nous invitera à prendre l'apéritif; mais cette fois, point de nakamal ni de kawa, mais la terrasse de sa maison et un whisky bien de chez nous!

La deuxième partie de la journée sera consacrée à quelques achats, à se connecter à internet au Nambawan puis à dîner le soir au restaurant Waterfront avant de retourner en ville pour la fête de la musique sans grand intérêt et sous la pluie.



Le lendemain, veille du départ, nous ferons les derniers approvisionnements au marché très fourni; on assistera également à l'arrivée du bateau inter-îles qui est toujours très attendue, ambiance et folklore garantis! Mais il ne fait pas bon être cochon sur ces îles!

Nous retournerons également aux douanes pour chercher notre permis de croisière dans les îles et confirmerons l'information que sur l'île de Pentecôte aura lieu le samedi suivant le dernier saut du Gol de la saison, cette coutume ancestrale ancêtre du saut à l'élastique!

Le soir, nous recevrons à dîner Emmanuel Watt qui est devenu un sculpteur internationalement reconnu; il représente d'ailleurs le Vanuatu dans toutes les manifestations culturelles internationales. Nous passâmes avec lui une agréable soirée.

A 13h30 le 23 juin, nous quittions notre mouillage pour prendre la direction de l'île de Pentecôte; nous quittions la "civilisation" pour aller retrouver l'authenticité d'une île reculée où perdurent les traditions les plus anciennes.

Île de Pentecôte et les hommes volants

Pluie et vent seront au programme de cette traversée; pendant la nuit, le rythme des quarts est parfois difficile à assumer!

C'est le lendemain à 10h30 que nous jetterons l'ancre dans Wali Bay devant quelques cases faisant office de village; le saut du gol doit avoir lieu le lendemain dans le village de Landot situé un peu plus au nord dans la baie; un voilier est d'ailleurs déjà mouillé à proximité.

Après le déjeuner, nous abordons sur la plage en annexe et un comité d'accueil composé d'une ribambelle de gamins nous y attend, excités par la venue d'un nouveau bateau. Une gamine de trois ans se balade déjà avec une machette à la main (!), tandis que trois autres se promènent en pirogue. Nous leur demandons s'ils savent exactement où se passeront le lendemain les fameux sauts; bien entendu, ils le savent et veulent tous nous accompagner dans l'annexe. Nous n'en prendrons que deux, dont la gentille et timide Georgina, les autres tenteront de nous suivre en pirogue. Nous nous inquiétons auprès de Georgina de savoir s'ils savent nager : pas de problème, ils savent déjà tout faire!



Nous débarquerons bientôt devant ce qu'il convient d'appeler le village de Londot qui ne comprend que quelques cases et un terrain aménagés de cases pour touristes mais qui semblent vides. Nous croiserons par hasard celui que les enfants nous présentent comme le chef, Luke Fargo. C'est lui qui est l'organisateur local de cet évènement et il se propose de nous emmener sur le site où des ni vanuatu préparent la tour d'où sauteront les intrépides hommes volants. Nous emmener sauf Maryse, car les femmes n'ont pas le droit d'accéder au site avant le jour J car elles ont le don de porter malheur!

Gérard et le captain suivent donc Luke à travers un chemin pentu et boueux où nous manquerons à plusieurs reprises de nous étaler tant le sol est glissant. Nous arriverons enfin au pied de la tour réalisée en branchages ligaturés par des liens végétaux; elle fait environ 25 mètres de hauteur et comporte plusieurs plateformes situées à différentes hauteurs d'où les hommes s'élanceront.

Le but du jeu est de monter sur une plateforme, de se faire attacher les chevilles à deux lianes et de sauter dans le vide; le choc à l'arrivée est violent, la plateforme où sont attachées les lianes est dimensionnée pour casser et basculer, ce qui permet d'amortir un peu le choc, et l'homme doit toucher le sol de ses épaules…. Celui-ci a beau être en pente et labouré, nous leur laissons volontiers notre place!

Luke nous précise que ce sera demain le dernier saut de la saison, car la qualité des lianes est importante pour la sécurité et en saison sèche (!!) celles-ci deviennent cassantes ce qui est pour le moins dangereux. Voilà donc les vrais précurseurs du saut à l'élastique, version édulcorée et sécurisée de nos amateurs occidentaux de sensations fortes!

Nous retrouvons ensuite Maryse sur la plage qui manifestement a fait l'unanimité auprès des enfants; Georgina et son frère reviendront avec nous sur Olympe d'où ils repartiront avec chocolat et tee-shirts et des sourires jusqu'aux oreilles.

C'est alors que nous verrons arriver devinez qui? Le super yacht de Lifou et Port Vila; décidément, il ne nous lâche plus! Puis nous verrons arriver en pirogue Georgina et son père venus nous offrir des noix de coco.

Durant la nuit, la pluie ne cessera de tomber avec une violence inouïe; nous n'avions jamais vu l'annexe pleine d'eau à ce point depuis notre départ de Saint-Malo. Après la séance d'écopage avec un seau, nous repartîmes le lendemain matin assister à ce spectacle étonnant prévu à 9h. Il pleut encore et nous sommes désolés pour les acteurs de ce spectacle des conditions dans lesquelles ils vont devoir œuvrer.

Ce n'est que vers 10h que commencera le discours de bienvenue de Luke aux équipages des quatre bateaux présents : un couple écossais déjà au mouillage à notre arrivée, l'équipage d'une dizaine de personne du super yacht et celui d'un bateau arrivé le matin même. Puis les enfants du village nous remettront un collier de fleurs avec un sérieux et une fierté attendrissants! Et puis miracle, la pluie cesse et nous laissera en répit jusqu'à midi.

Nous nous dirigeâmes ensuite vers la tour sur le même chemin que la veille mais encore plus glissant et assistâmes aux sauts effectués de plus en plus haut au rythme de chants et de danses primitives de la tribu.

Avant chaque saut, le sauteur se fait lier les chevilles aux lianes, toujours avec des liens végétaux, puis il se concentre en criant les yeux vers le ciel avant de se jeter dans le vide sans aucune hésitation. La violence du choc à l'arrivée est réelle et l'on se demande comment il est possible d'en sortir indemne; d'ailleurs l'un des sauteurs se fera mal à une cheville. Et tous toucheront le sol de leurs épaules ou de leur dos!

Mais plutôt qu'un long discours, le mieux est encore de voir les photos…



Le spectacle terminé, nous retournerons déjeuner au bateau avec un arrêt chez Georgina où un groupe d'enfants nous attendait pour nous offrir des papayes et des citrons verts. La pluie revenant de plus belle, nous passerons l'après-midi à jouer au rami.

Le lendemain matin, le temps est exécrable : il pleut, le vent est soutenu et la visibilité réduite. Mais nous avons prévu de partir pour Norsup sur l'île de Malakula.

Le moteur démarre mais l'alarme de charge batterie de démarrage se déclenche : la courroie d'entraînement de l'alternateur s'est cassée. Le temps de la remplacer et nous relevons le mouillage, toujours à la main : les muscles du captain gonflent de jour en jour. Et c'est à regret que nous quittons cette île et surtout leurs habitants si accueillants.

Île Malakula, pélerinage à Norsup

La traversée vers Malakula sera musclée : vent de travers, 35 à 40 nœuds et mer forte. Heureusement, il n'y a que 45 milles à parcourir et avec cette allure nous ne mettrons que cinq heures et demie. Non seulement la pluie a cessé peu avant l'arrivée, mais le soleil s'est mis à briller! Nous mouillons au nord de Port Stanley devant le village de Norsup, à l'abri des vagues mais pas de la houle qui rendra le séjour assez inconfortable. Inutile de dire qu'à cet endroit paumé, nous sommes à nouveau seuls au mouillage!



Cette étape est importante pour Gérard qui a habité Norsup pendant deux années pleines lors de son "exil" dans cet archipel. A peine débarqués, nous sommes assaillis par une autre ribambelle d'enfants qui va nous suivre un moment; Gérard reconnait le four à copra et l'atelier de mécanique aujourd'hui désaffecté, ainsi que le magasin d'alimentation. Par contre, il a du mal à reconnaître le rivage qui a changé d'aspect avec la végétation qui a poussé.

Nous tentons de partir en direction de son ancienne maison mais nous nous trompons de chemin; deux femmes nous mènerons alors chez Jules qui nous conduira par un raccourci dans le village; mais la nuit tombant, nous rentrâmes au bateau, remettant le pèlerinage au lendemain.

Le lendemain matin, tandis que Gérard part à la pêche de ses souvenirs, Maryse reprend avec l'aide du captain les coutures d'une partie de la grand-voile qui se déchire le long de la chute. On profite aussi du beau temps revenu pour faire quelques lessives bien venues.

De retour à bord, Gérard nous raconte qu'il a retrouvé sa maison avec l'aide d'un guide improvisé car il ne l'aurait jamais retrouvée seul. Nous décidons d'y retourner le lendemain.



Nous partons alors le long du rivage en traversant le village pendant qu'Olympe nous attend sagement au mouillage; nous passons devant les maisons des gilbertins, les anciens ouvriers de la PRV (Plantation Réunie du Vanuatu), la plus grande de l'archipel. Puis nous passons devant l'église qui existait déjà à l'époque avant d'atteindre le lycée et le collège créés en 1992, quelques années après le départ de Gérard, et où nous discuterons avec quelques lycéens, puis l'hôpital déjà existant mais en moins important.

Ce sera ensuite un centre de formation pour adultes financé par le gouvernement australien avant de rencontrer le proviseur du lycée puis Jules qui nous avait guidé l'avant-veille. Celui-ci nous mènera à l'ex-maison de Gérard où la pauvre locataire des lieux se demandait bien pourquoi tant de photographes étaient venus mitrailler sa maison!

Sur le chemin du retour, nous passerons le long de l'ancien aérodrome aujourd'hui envahi par la forêt; pas étonnant que Gérard ne reconnaisse pas les lieux! Nous nous arrêterons à l'épicerie pour y trouver le pain commandé et un magnifique filet de bœuf local pour un prix dérisoire et qui s'avèrera délicieux.

L'après-midi, nous irons nous promener en bord de mer de l'autre côté de la baie pour revenir par l'immense cocoteraie de la PRV. Nous allions passer notre dernière nuit à Norsup dont nous nous demandions comment Gérard avait pu "tenir" deux ans dans ce bled!

Le lendemain matin, nous partions pour la plus grande des îles de l'archipel, Espiritu Santo.

 

 

Île Espiritu Santo

C'est une navigation agréable qui nous attendait et qui nous permit de gagner en six heures Luganville, la capitale de l'île et seconde et dernière ville de l'archipel après Port Vila. Nous jetâmes l'ancre à l'ouest de la rivière devant les installations de l'hôtel Beachfront Resort.

Espiritu Santo, communément appelée Santo, est la plus grande île de l'archipel et a été pendant la seconde guerre mondiale une base militaire américaine importante; à la fin de la guerre, les américains se débarrassèrent de tous leurs matériels en les coulant à l'extrémité Sud-est de l'île dénommée depuis One Million Dollar Point! Pour les amateurs de plongée en bouteille, il y a aussi l'épave d'un paquebot de croisière, le Président Coolidge, qui sauta sur une mine à l'entrée du Segund Channel alors qu'il servait de transporteur de troupes. Long de 200 mètres, c'est en quelque sorte un autre Titanic mais situé entre 30m et 70m de profondeur seulement.

Le temps de déjeuner et nous recevons la visite d'un couple australien propriétaire d'un Super Maramu mouillé de l'autre côté du Segund Channel, le long de l'île Aore. On en voit décidément partout!

Le lendemain, tandis que le captain reste au Beachfront Resort pour se connecter à internet, Maryse et Gérard partent à la découverte de la ville; le centre de celle-ci étant assez éloigné du mouillage, ils trouveront rapidement une navette qui, avec les petits taxis, sillonne le front de mer, vous prenant et vous déposant n'importe où pour un prix dérisoire. Ils repèrent le marché, la douane et le service d'immigration, quelques magasins d'avitaillement mais surtout un restaurant français où ils réservent pour le soir!

A 16h, nous repartons tous en ville; celle-ci s'étire toute en longueur sur la route du front de mer. Le captain mécontent du fonctionnement d'internet à l'hôtel veut trouver un cybercafé plus performant. Puis nous irons dîner chez le couple français tenant "Le Jardin des Saveurs", tout un programme, où nous mangerons très bien mais pour un prix lui aussi… français!

Le 1er juillet fut une journée cool; lessives, rédaction du site et réservation d'une voiture pour le lendemain furent nos principales occupations. Et quelle voiture! Nous n'allions pas passer inaperçus!

La chaîne montagneuse de l'île étant située à l'ouest, cette côte n'est pas accessible en voiture mais seulement par la mer. Seules la côte sud et la côte est sont accessibles par route ou par piste, ainsi que Big Bay située au nord. Le programme de notre journée du 2 est de remonter la côte est jusqu'à Port-Olry.

Nous allons chercher la voiture et nous apercevons que le loueur est un fervent supporter de l'OL dont il arbore fièrement l'écharpe!

Nous aurons la bonne surprise de constater que la piste qu'avait empruntée Gérard 25 ans plus tôt est désormais bitumée. Nous partirons d'abord en direction de One Million Dollar Point situé à l'écart de la route ce qui nous donnera l'occasion de faire quelques kilomètres de vraie piste. Une fois arrivés, le captain ira plonger pour admirer tout un barda militaire invraisemblable : Jeeps, chenillettes, bateaux, barges, canons, tout ce qu'une armée en campagne peut trimbaler se trouve sous quelques mètres d'eau seulement. C'était à la fois émouvant mais, à y réfléchir, un peu lamentable d'avoir ainsi laissé tous ces matériels en s'en débarrassant de la sorte.

Puis nous reprendrons la piste pour rejoindre quelques dix kilomètres plus loin la route principale et gagner Peterson Bay et Turtle Bay, un endroit magnifique protégé par les îles Malono, Malwapa et surtout Oyster Island; l'endroit est absolument idyllique et le mouillage, délicat d'accès pour cause de nombreux platiers de corail, est extrêmement bien protégé de tous les vents.

Une petite faim nous gagnant déjà, nous ne résisterons pas à l'idée d'un petit déjeuner dans un motel bordant Turtle Bay!

Puis un peu plus au nord, nous irons observer une curiosité de la région, l'un des trous bleus rempli d'une eau d'une extrême pureté mais dont la roche du fond la fait paraître d'un bleu intense. Cette fois c'est Gérard qui ne résistera pas à l'idée d'un bain dans cette eau néanmoins assez fraîche.

Pour l'heure du déjeuner, nous arriverons aux plages Champagne Beach et Lonnoc Beach, plages de sable blanc très fin d'où l'on aperçoit Elephant Island. Nous déjeunerons au Lonnoc Beach Resort dans le restaurant de la plage; au menu, buffet à volonté: crabes, poissons, viande, salades et légumes variés. Nous étions ainsi repus jusqu'au soir!


En milieu d'après-midi enfin, à l'extrémité nord de la route, nous atteignîmes le village traditionnel de Port-Olry également situé en bordure d'une très jolie plage; ce village fut sans doute un centre missionnaire catholique important à en juger par l'église Sainte-Anne et l'école du même nom; l'habitat est essentiellement constitué de cases traditionnelles. On aurait l'impression de vivre quelques siècles auparavant si quelques voitures ne venaient troubler la quiétude du lieu. Seule la mairie est en dur, si l'on peut dire! Nous sommes, au sens propre comme au sens figuré, au bout du monde!

Sur la route du retour nous nous arrêterons à un séchoir de copra qu'une famille alimentait et qui fut fière de poser pour la postérité.

De retour à Luganville, nous profitâmes de la voiture pour faire les courses en vue de la traversée vers l'Australie que nous comptions entamer le 5 juillet; c'est le lendemain que nous rendîmes la voiture après avoir fait le plein et s'être aperçu que nous avions consommé 20 litres au cent kilomètres sans avoir jamais dépassé les 75 km/h…

L'après-midi, nous partîmes en annexe remonter la rivière Sarakata sur quelques kilomètres, croisant de nombreux ni vanuatu pêchant sur la rive ou des jeunes en pirogue; et à chaque fois nous avions droit à des gestes d'amitié tout à fait spontanés. La gentillesse et la qualité d'accueil de ce peuple n'est pas uniquement un argument commercial d'agence de voyage!

Puis nous traverserons le Segund Channel pour aller rendre visite au Super Maramu australien dont le propriétaire était en plein bricolage dans son coffre arrière. Le captain se fit confirmer la procédure d'arrivée en Australie avec l'envoi d'un mail avant le départ aux douanes. On lui conseillera d'en attendre l'accusé de réception avant de mettre les voiles!

Les deux derniers jours seront consacrés aux derniers approvisionnements, aux consultations des fichiers météo et à l'envoi du mail avec tous les renseignements demandés. Nous effectuerons également les formalités de sortie du territoire.

Le 6 juillet, nous levions l'ancre, destination Cairns à 1266 milles plein ouest, après avoir parcouru 600 milles depuis Nouméa.

Retour haut de page