OLYMPE AUTOUR DU MONDE

 

NOUVELLE ZELANDE - NOUVELLE CALEDONIE

Nous avions enfin réussi à atteindre la fameuse Bay of Island située au nord de la Nouvelle-Zélande, peu avant la date prévue de départ de ce magnifique pays pour la Nouvelle Calédonie.

Début avril, c'est encore un peu tôt en saison pour remonter vers le nord du Pacifique ouest, même si la saison "officielle" des cyclones se termine en principe fin mars; il n'est pas rare en effet qu'un cyclone tardif puisse venir troubler les statistiques et beaucoup de navigateurs préfèrent attendre la fin du mois d'avril pour entamer cette traversée.

Mais si l'on veut pouvoir traverser plus tard l'océan indien à la bonne saison, il ne nous faut plus tarder et le captain analyse quotidiennement les fichiers météo dans l'attente d'une bonne fenêtre. La distance à parcourir de 900 milles environ devrait pouvoir être avalée en six jours, délai au cours duquel il y a peu de chance qu'un phénomène tropical cyclonique puisse se former si rien n'est amorcé dans les prévisions météo avant de partir.

Le 5 avril, les conditions semblent favorables à ceci près qu'un système dépressionnaire est prévu de se former à l'ouest et sud-ouest de la Nouvelle Calédonie au moment de l'arrivée; on envisage alors de ne pas faire route directe vers Nouméa, mais vers l'est du territoire afin d'éviter cette perturbation. Mais tout de même, on aimerait voir comment va évoluer cette prévision avant de larguer les amarres!

Le 6, les prévisions confirment cette dépression qui se déplacerait doucement vers le sud-ouest; nous pensons cependant qu'elle ne devrait pas se muer en tempête tropicale car la température de l'océan a baissé. Nous envisageons donc notre départ pour le surlendemain et rejoignons un mouillage devant Opua afin d'y effectuer les formalités de sortie. Le 7, nous nous présentons au bureau des douanes où une préposée peu aimable (la première et la seule que nous ayons croisée en Nouvelle-Zélande!) nous dit qu'il faut un délai de 72h pour les effectuer…Nous appelons alors directement l'officier des douanes en charge du poste qui nous donne rendez-vous le lendemain à 9h. La bonne nouvelle, c'est que les nouvelles prévisions météo ne font plus mention de la dépression à l'arrivée et que nous pourrons faire route directe sur Nouméa.

Le 8 avril à 9h30 les formalités sont effectuées et à 10h05, après avoir fait le plein de gasoil, nous larguons les amarres après près de cinq mois passés au pays des Kiwis. Pendant une heure, nous allons sortir au moteur de la baie des îles en suivant le chenal principal car le vent est perpétuellement changeant en direction. Puis une fois avoir passé le cap Wiwiki et être sortis de la baie, nous établirons les voiles au grand largue par vent de sud sud-est force 3 à 4.

Les premières heures seront donc tranquilles, longeant la côte au large sous le vent de cette dernière, donc sur mer plate, en direction du cap Nord. Le vent sera variable en force, faisant fluctuer la vitesse du bateau entre 3,5 et 7,5 nœuds. Nous passerons dans l'après-midi au large des îles Cavalli puis, en fin soirée, nous ferons route commune avec un bateau de pêche qui finira par se rapprocher de la côte puis par disparaître.

Dans la nuit, nous doublerons de loin le Cap Nord et subirons alors une houle importante de sud-ouest en provenance de la mer de Tasmanie; le vent étant faible et les voiles peu portantes, les conditions de roulis seront alors inconfortables. Au petit matin du 9 avril, nous changerons d'amure, tangonnerons le génois sur bâbord et installerons les retenues de bômes.
A 7h du matin, un cargo nous rattrapera par l'arrière et nous devrons le surveiller de près au radar, ne comprenant pas dans un premier temps sa trajectoire; il finira par passer à un mille derrière en coupant notre sillage après nous avoir causé un peu de soucis…

Le premier point journalier indique une distance parcourue de 145 milles ce qui est somme toute honorable compte tenu des conditions de vent; le nettoyage de la coque à Gulf Harbour y est sans doute aussi pour quelque chose! Mais à 10h30, le vent tombe complètement et nous avons alors recours au moteur pendant 5 heures avant qu'Eole, compatissant, ne daigne nous renvoyer un peu de son souffle. Au cours de cette seconde journée pourtant, les choses ne vont pas s'améliorer : en plus de la houle de sud-ouest toujours présente, arrive une houle d'est croisant la précédente et conduisant à encore plus d'inconfort!

Comment se comporte alors l'équipage? Et bien le mousse, élevé maintenant au grade de second, est en pleine forme; Maryse a su bien doser son Stugéron qui est d'une remarquable efficacité et ses talents culinaires font merveille: hachis Parmentier, bœuf Bourguignon et autres plats préférés du captain sont réalisés avec maestria malgré les conditions de roulis. C'est le captain qui a des problèmes avec des maux de tête tenaces qui ne le quitteront pas durant trois jours; insolation, déshydratation ou autre cause, nous ne trouverons pas d'explication et ils finiront par passer comme ils étaient venus.

Par contre, comme tout début de traversée, le rythme des quarts est assez fatigant; les cycles de trois heures de sommeil sont difficiles à supporter et il faut attendre la troisième voire quatrième nuit pour que nos organismes acceptent ce rythme sans rechigner.

Autre sujet de satisfaction, le fonctionnement remarquable du nouveau groupe que nous activons deux fois par jour pour alimenter le chargeur de batteries.

A 5h40 du matin, le vent tournant, il nous faut détangonner le génois ce qui est fait avec dextérité. 164 milles seront ainsi parcourus au cours de la seconde journée, un peu moins sur la route car nous oscillons de part et d'autre de la route directe en empannant pour avoir un angle au vent plus favorable.

La journée du 10 sera assez monotone, avec une vitesse oscillant entre 5,5 et 6,5 nœuds et quelques surfs de 8 noeuds sur les vagues. Dans la nuit suivante, deux cargos nous doublerons sur bâbord respectivement à 2 et 6 milles. Le point du 11 donnera 155 milles parcourus, confirmant l'estimation de la moyenne prévue pour un trajet en 6 jours.

Mais le 11 avril l'alizé de sud-est va se renforcer, en même temps que la houle se stabiliser à l'est. L'anémomètre grimpera progressivement à 16, 18, 20 puis 25 nœuds apportant plus de vitesse et plus de confort. A midi, le vent est plein arrière et nous tangonnons à nouveau le génois avec la grand-voile en ciseaux. Nous n'envoyons pas le balooner car nous estimons la vitesse suffisante et souhaitons arriver de jour sur Nouméa. Malgré tout, la moyenne augmente et la quatrième journée est créditée de 173 milles parcourus.

A midi, le 12 avril, nous réduisons le génois que nous avons détangonné pour mettre le cap au 339° sur le point d'atterrissage au large de la passe d'entrée du lagon. Le vent est bien établi à l'est, nous sommes vent de travers et la vitesse continue d'augmenter! Dans la nuit suivante, le vent se stabilisera entre 25 et 30 nœuds et la vitesse du bateau entre 8 et 9 nœuds avec quelques surfs à plus de 10. Sauf à mettre en panne, on ne voit pas très bien comment ne pas arriver de nuit!

183 milles seront parcourus au cours de cette cinquième et avant dernière journée, la sixième et dernière se réduisant comme peau de chagrin avec l'avance que nous prenons sur le tableau de marche!

Vers 15 h le 13 avril, le vent tourne au nord-est et baisse à 7-9 nœuds; on se retrouve au près serré à 5 nœuds, ce qui ne nous ralentira pas assez pour éviter l'arrivée de nuit, d'autant que le vent forcira à nouveau deux heures plus tard. Pour notre dernière soirée en mer, nous aurons droit à un magnifique coucher de soleil avec des effets de nuages inhabituels.

Et bien, puisque l'arrivée de nuit est inéluctable, profitons en pour nous amuser un peu et naviguer à l'ancienne avec les alignements lumineux! A 22h30, nous atteignons notre point d'atterrissage programmé à trois milles de la passe Boulari. Il nous reste 21 milles à parcourir au milieu des récifs et des nombreux îlots du lagon avant d'atteindre le mouillage d'attente de Port Moselle. Nous roulons le génois car le vent est pile dans l'axe d'entrée de la passe et poursuivons au moteur assisté de la grand-voile. L'alignement au 50° est donné par le grand phare à éclat de l'îlot Amédée (2 éclats blancs toutes les 10 secondes) et du petit phare scintillant à secteur intense entre le 47° et le 53° vrais. On laisse sur bâbord le phare du Tabou (4 occultations à secteurs) puis on s'oriente sur le cap 325° en laissant sur tribord la bouée verte de la Basse Amédée. Une fois que le secteur rouge du phare du Tabou redevient blanc, cap au 356° pendant 5 milles, laissant sur tribord la bouée verte Thisbé (2 éclats toutes les 6 secondes) jusqu'à obtenir l'alignement d'entrée à Nouméa au 347° vrai donné par les deux feux directionnels blancs de l'île Nou (4 occultations pendant 12 secondes), à respecter impérativement pour éviter la petite île aux Canards qui se confond avec la côte. On passe ensuite entre l'îlot Maître et l'île aux Canards jusqu'à croiser sur tribord l'alignement vert d'entrée dans la petite rade au 55° vrai.

La suite se fera au ralenti avec le spot longue portée vers la zone de mouillage où aucun des nombreux bateaux n'avait allumé ses feux et où nous trouverons une bouée dont Maryse attrapera du premier coup avec la gaffe l'énorme amarre dimensionnée pour un cargo (!) et qui salira toute la plage avant du bateau…

Il était 2h du matin, nous étions heureux de cette traversée sans problème et de cette arrivée de nuit, satisfait du travail accompli. Nous ne mîmes pas beaucoup de temps à nous endormir avant de prendre contact à 8h du matin avec la marina pour l'obtention d'une place au quai des visiteurs pour les formalités de douanes, d'immigration et du service sanitaire qui furent effectuées en moins de deux heures. Nous étions à nouveau sous la chaleur moite des tropiques en ayant gagné une dizaine de degrés en cinq jours et demi de navigation et une heure de décalage horaire!

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